Pour attirer les visiteurs, les parcs investissent des millions dans des attractions de plus en plus incroyables. Mais comment sont-elles conçues ?

Parkings, bureaux, entrepôts…
C’est une zone d’entreprises banale.
A un détail près : dans un coin, une petite piste de rails en forme de cercle annonce la couleur.
“Elle nous a servi à tester de nouveaux wagons”, explique Maximilian Roeser, responsable du marketing chez Mack Rides, un des leaders mondiaux de la fabrication de… montagnes russes.
Situé à Waldkirch, en pleine Forêt noire allemande, c’est dans ses ateliers que sont nés certains des manèges à sensation les plus populaires du monde.
Et notamment ceux d’Europa-Park, propriété de la même famille Mack, deuxième parc d’attractions d’Europe (5,6 millions de visiteurs l’an dernier, derrière Disneyland Paris, 13,4 millions de visiteurs en 2016), situé à une quarantaine de kilomètres de là.

Mack Rides headquarters

Dans ses ateliers, les ouvriers spécialisés travaillent en musique sur la fabrication des rails et des wagons de trois roller coasters destinés à des parcs d’attractions aux Etats-Unis et en Europe.
Dans des effluves de métal chauffé, certains façonnent les tubes d’acier qui formeront les rails à l’aide de machines-outils très évoluées, d’autres travaillent sur des éléments de décor des wagons en forme d’animal ou de machine à remonter le temps…
Fondée en 1780, cette entreprise familiale est presque aussi ancienne que le concept même de montagnes russes.

  Mack Rides

Comme leur nom l’indique, les premières attractions y ressemblant ont été inventées en Russie, au XVIè siècle.
A l’époque, il s’agit de structures en bois d’une vingtaine de mètres de hauteur : d’un côté des escaliers pour monter, de l’autre une pente recouverte d’une couche de glace, que les casse-cou dévalaient dans un siège en osier.
Au début du XIXè siècle apparaissent les wagons à roues, avec de nombreux déraillements…
Pour renforcer la sécurité, le système à trois roues qui enserrent le rail est rapidement inventé.
Les premières attractions basées sur des trains mus par la gravité sur des parcours complets apparaissent aux Etats-Unis, puis dans le monde entier.
Depuis, ces manèges à sensation forte n’ont cessé d’évoluer.

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160 km/h, 14 loopings, 170 mètres de haut… les chiffres fous des montagnes russes

Aujourd’hui, leurs performances font frissonner.
En 2020, le parc américain Skyplex ouvrira ainsi Skyscraper, le plus haut roller coaster du monde, avec 170 mètres de hauteur !

thumb Skyscraper at Skyplex

En attendant, les wagons de l’attraction Kingda Ka, du parc Six Flags Great Adventure, 139 mètres de haut, effectuent une rotation à 270 degrés avant de dévaler une pente vertigineuse, à 160 kilomètres-heure.

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Moins rapide cependant que la propulsion à 240 kilomètres-heure en cinq secondes de Formula Rossa, du parc Ferrari World d’Abu Dhabi…

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Autre recordman de la tête à l’envers : The Smiler, au parc Alton Towers, au Royaume-Uni, et ses 14 loopings (aussi tristement célèbre pour un grave accident en 2015).

The Smiler

Votre estomac peut en supporter plus ?
Au Japon, la montagne russe de Takabisha, au parc Fuji-Q Highland, ravit les plus grands fans de roller coaster avec sa chute inclinée à 121 degrés qui donne l’impression de tomber dans le vide…

takabisha

Espagne : descente à la vitesse… d’une Ferrari.
Inauguré en avril 2017 dans une annexe du parc Port Aventura consacrée à Ferrari et visible à des kilomètres à la ronde, Red Force est un accélérateur vertical qui fait chuter ses wagons de 112 mètres de haut, à la vitesse de 180 kilomètres-heure.
Soit une force de 1,3 g. De quoi vivre des sensations proches de celle de la conduite d’une F1, promet le parc.

Selon la base de données en ligne Roller Coaster DataBase, il y aurait ainsi plus de 4.500 montagnes russes dans le monde, visitées par plus de 400 millions de personnes chaque année.
En France, les parcs de loisirs (dont font partie les parcs d’attractions, mais aussi les zoos et les aquariums) ont attiré près de 52 millions de visiteurs en 2015 pour un chiffre d’affaires de 2,2 milliards d’euros, selon le Syndicat national des espaces de loisirs, d’attractions et culturels (Snelac).
Et le secteur est en croissance constante.
Une nouvelle attraction peut amener 5 à 10% de visiteurs en plus !

red force

Un savant mélange d’accélérations et de freinages

Mais comment ces manèges à sensation sont-ils conçus ?
Certains mastodontes comme Walt Disney Parks and Resorts ont leurs propres équipes en interne.
A Glendale, en Californie, les 1.500 salariés de Walt Disney Imagineering, ingénieurs, designers, architectes, écrivains, metteurs en scène, analystes, appelés “imagineers”, sont ainsi chargés de concevoir les futures attractions du groupe.
Mais la plupart des parcs font appel à des fabricants spécialisés, peu nombreux, parmi lesquels l’allemand Mack Rides bien sûr, mais aussi Intamin (Suisse), Vekoma Rides Manufacturing (Pays-Bas) ou S&S Worldwide (Etats-Unis)…

Mack Rides Logo.svg

Frédéric Pastuszak, architecte spécialisé dans la conception d’attractions à sensation, explique le processus :
Le fabricant part d’un constat avec le client : quelle est la cible qu’il veut toucher – les montagnes russes extrêmes attirent plutôt les adolescents et les jeunes adultes, les attractions plus calmes les familles – quels types d’attractions possède-t-il déjà, quel est son budget et, enfin, a-t-il une idée de thématique ?
Montée, pente vertigineuse, looping, virage serré…
On dessine ensuite le tracé en fonction des forces g qui s’exerceront et s’enchaîneront sur le corps des passagers”, poursuit Maximilian Roeser.
Entre accélérations et freinages, c’est ce savant mélange de ces différentes forces qui rend les montagnes russes si excitantes. Ce sont de pures mathématiques, calculées par des logiciels”, détaille-t-il.

vekoma ridesmanufacturing bv

Des budgets en millions d’euros

En général, les fabricants de manège ne dépassent pas les 4 g, sous peine que le roller coaster soit vraiment désagréable, mais pour accroître les sensations, les ingénieurs disposent d’autres leviers en jouant sur la hauteur, le bruit du manège, mais aussi en donnant l’impression que l’on va se cogner contre des éléments de la structure, alors qu’en réalité l’espace autour des rails est entièrement sécurisé.
Une fois que le constructeur et le parc client sont d’accord, la production peut commencer.
L’attraction est ensuite transportée en kit, généralement par bateau, puis assemblée sur place.
“Le budget peut varier de 1 à 100, principalement selon la taille mais aussi le décor”, explique Julien Simon, ingénieur projet et développement à la Compagnie des Alpes, qui gère, entre autres, le Parc Astérix, le Futuroscope ou Walibi Rhône-Alpes…

Inauguré en 2014, Arthur au Royaume des Minimoys, une plongée poétique dans l’univers du film à succès de Luc Besson, a ainsi coûté à Europa-Park la coquette somme de 25 millions d’euros.
Il faut toujours qu’une attraction raconte une histoire, même si c’est une montagne russe qui va très vite”, souligne Frédéric Pastuszak, qui a participé à sa conception.

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Au Parc Astérix, l’attraction OzIris, construite en 2012 par le suisse Bolliger & Mabillard pour 20 millions d’euros, est ainsi entourée de tout un quartier autour du thème de l’Egypte ancienne.
Un manège à sensation doit également être conçu pour ceux qui ne montent pas dessus. Elle doit être aussi impressionnante à voir qu’à faire : il faut que 100% des clients s’en rappellent, qu’ils l’aient faite ou non”, assure Jean Hervé Madec, directeur développement à la Compagnie des Alpes.

Oziris

Design et déco pour attirer les foules

A l’heure des réseaux sociaux, une attraction photogénique est en effet un bon plan marketing.
La part du budget consacrée au design est ainsi de plus en plus importante.
Vu qu’on a atteint un palier en termes de limites humaines, les parcs accordent plus d’importance à la thématisation pour se distinguer de la concurrence. Jusqu’à la moitié du budget peut être consacré à la décoration.
Créer des univers, c’est l’un des points forts des parcs Disneyland, mastodonte du secteur.

Walt Disney studios Makeover Extension 2021 CONCEPT ART

En 2006, l’ouverture d’Expedition Everest à Disney’s Animal Kingdom en Floride a ainsi fait grand bruit grâce à ses décors époustouflants : la montagne russe est construite autour et à l’intérieur d’une immense montagne artificielle de 106 mètres de hauteur, avec cimes enneigées, village himalayen et yéti géant… Coût total du projet : 100 millions de dollars !

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Allemagne : vol au coeur du réacteur.
En 1995, une centrale nucléaire (jamais mise en service), à proximité de la frontière néerlandaise, a été transformée en parc d’attractions, le Wunderland Kalkar.
Un pylône de 58 mètres de haut a été installé dans la cheminée de refroidissement d’où sortent des chaises volantes permettant de profiter d’une belle vue sur le Rhin.

Wunderland Kalkar

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